Kahnweiler
se rend au Bateau-Lavoir et rencontre Picasso. Face aux Demoiselles d'Avignon
c'est la révélation. Désormais le cubisme, qui ne porte pas encore de nom, va
naître chez Kahnweiler, ce sont ces peintres qu'il veut défendre. Kahnweiler
passe ses journées entre sa galerie et les ateliers de Derain, Picasso et Vlaminck.
Le matin après avoir répondu à son courrier il visite ces peintres à Montmartre,
l'après-midi ils viennent à la galerie. Kahnweiler ne se contente pas de leur
acheter des toiles, il est aussi et surtout leur confident. Il suit les étapes
de leurs créations. Il note quelques-unes des phrases clés de l'avancement de
leurs travaux. On les retrouve dans Huit entretiens avec Picasso et Six
entretiens avec Picasso.
Kahnweiler sait pertinemment qu'il vit une époque unique : le renouvellement de l'art se fait dans sa galerie. Au Bateau Lavoir il rencontre Max Jacob, puis Juan Gris, qui deviendra l'un de ses plus proches amis. Les soirées se passent chez les uns ou chez les autres. " Nous vivions dans une atmosphère d'euphorie, de jeunesse, d'enthousiasme qu'on ne peut plus guère imaginer. " Kahnweiler signe des contrats d'exclusivité avec Vlaminck, Picasso, Gris, Léger et Braque. Cette sécurité crée un climat de travail particulier. Sans soucis matériels les peintres progressent. Pendant les sept années qui séparent l'ouverture de la galerie de la déclaration de la Première Guerre Mondiale, le cubisme foisonne entre les murs de la petite galerie. Le nouveau courant voyage entre New York et Saint-Pétersbourg où les amateurs étrangers sont souvent plus ouverts à l'avant garde française.